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« Je peux regretter que la vie ne m’ait pas distribué les meilleures cartes, mais je ne peux pas les changer, il me reste donc à décider comment je vais jouer avec ce que j’ai en main. Et c’est ce que je fais.
Je joue de mon mieux. »

Mary E. Pearson

Qu’est-ce que le syndrome de Lyell ?

Le syndrome de Lyell

Ancre 1



Le syndrome de Lyell (ou NET, necrolyse épidermique toxique) est une maladie rare (1 cas sur 1 million par an) et grave (taux de mortalité situé autour de 25/30%). Ce syndrome est une toxidermie grave, liée à la prise d’un médicament. Nous parlons aussi du syndrome de Stevens  Johnson (la différence est le pourcentage de la surface corporelle touchée).


Il se caractérise par un décollement de la peau et des muqueuses (yeux, bouche, organes génitaux). Il peut également atteindre les organes vitaux. Le syndrome est décrit comme l’affection dermatologique la plus sévère.


La prise en charge de ce syndrome se fait dans un service de réanimation chez les Grands Brûlés. Le traitement consiste à arrêter le médicament en cause, une asepsie rigoureuse et une réhydratation par intraveineuse. 


Les survivants d’un syndrome de Stevens Johnson ou d’un syndrome de Lyell gardent beaucoup de séquelles (oculaire, risque de cécité ; respiratoire ; cutané ; buccale ; psychologique....).
 


Je tire mes sources de : WIKIPEDIA / PASSEPORT SANTE
 

Le début de la crise



Nous y sommes. Je vais vous faire le récit de mon syndrome de Lyell. Toutes les victimes des syndromes de SSJ et Lyell sauront que cela est difficile à raconter. En effet, cette maladie arrive très brutalement et sans prévenir. Ces mots ont été très durs à poser, mais les choses sont ce qu'elles sont, et autant donner un sens à cette épreuve !

Voici mon histoire.

Ancre 3

Vendredi 29 Septembre

Tout allait bien. Je quittais mon boulot, nouveau départ pour moi et mon chéri. Très excitée et impatiente d’entamer un nouveau chapitre. Mon chéri n’était pas dans le coin à ce moment-là ! Pas très grave il allait vite revenir près de moi.


Le soir même je suis invitée chez ma bonne copine M. en plus trop chouette mon bon copain C. est là aussi ! La soirée se passe. Je me plains de maux de tête. Assez fréquents chez moi car je suis très migraineuse. Je commence aussi à avoir un œil qui me démange. Idem, je suis sujette aux allergies aux pollens / poils d’animaux …. Je ne m’inquiète pas.


Je rentre chez moi pour mon premier dodo dans ma nouvelle vie.

Dimanche 1 Octobre

Le matin ça ne va toujours pas. Maman me conduit à nouveau à la maison médicale. Mon dieu, le regard des gens. Que m’arrive-t-il ? C’est tellement dur ces démangeaisons. Je me gratte aussi fort que je peux ! (Moi impatiente ? Non !)


Le docteur me reçoit. Diagnostic : varicelle. Mais je l’ai eu étant petite ! Eh bien, nous pouvons récidiver. OK. Bon, le docteur très sympa, me donne un cachet de morphine. On rentre, je vais directement au lit. Je n’arrive pas bien à me lever. Je me force. Mes yeux gonflent. Mes lèvres aussi, j’ai de plus en plus de boutons dans la bouche. Horrible.


Le soir je vais prendre une douche pour me soulager à nouveau. Je sors de la douche m’habille. BIM 1er malaise. Première fois de ma vie que je tombe dans les pommes d’ailleurs.  Mon père m’a entendu tomber. Ils me remettent au lit fissa fissa.


Je m’endors très difficilement.

Mardi 3 Octobre

Je souffre au point de dire à ma mère que je veux tout arrêter. Il faut que ça cesse. Ce n’est pas possible de souffrir autant. Est-ce qu’une varicelle vous donne envie de mourir ? Je souffrais tellement.
Elle appelle le SAMU.
« Non Madame, une jeune femme de 28 ans, une varicelle, je ne déplace pas une ambulance pour ça. »
Soit, mes parents me conduisent aux  Urgences d’Avignon par leurs propres moyens.

4h00 du matin : je me réveille très brutalement, à cause de démangeaisons importantes dans le dos. Une araignée a dû se glisser dans les draps. Je me rendors tant bien que mal.


Au matin, les démangeaisons sont toujours là. Mon œil me démange encore. J’en parle à ma maman qui me conseille de laver mes draps et de me vider un petit flacon de sérum physiologique dans l’œil. Rien à faire ça ne passe pas. Je me sens assez faible.


Nouvelle surprise, il apparait des lésions assez étranges dans ma bouche. Taches de sang / sortes d’aphtes (plutôt des petites bulles) et dépôt blanc au fond de la gorge. Cela m’inquiète. Nous sommes samedi, je dois me rendre à la maison médicale d’Avignon.


Une fois sur place je vois un premier docteur. Il me dit que les dépôts que j’ai dans la bouche sont des résidus de l’angine que j’ai eue début septembre. Les petits boutons sont des réactions allergiques, rien de grave. Il me prescrit quand même de la cortisone. Le soir je dois me rendre chez ma sœur pour une soirée entre filles.


Les symptômes ne passent pas. Cela devient très angoissant, j’ai de plus en plus de boutons dans le dos et je commence à en avoir sur le visage. Je suis obligée de rentrer de suite chez mes parents, car très mal. Je commence à faire part de ma forte angoisse à mes parents, qui me disent de me calmer, que le stress doit y jouer.


Dans la nuit mon état s’aggrave encore. De plus en plus de boutons. Je me lève très régulièrement dans la nuit pour prendre des douches chaudes, histoire de me soulager un peu.

Samedi 30 Septembre

Nous appelons le médecin de famille qui se déplace et vient me voir. Idem, elle dit que c’est la varicelle, mais aucun cachet ne fait effet. J’ai 40 de fièvre, impossible de me lever. Ma bouche est de plus en plus impressionnante, ma langue est devenue complètement blanche. Elle prescrit à nouveau de la morphine. J’en reprends donc.


Le soir je me sens à nouveau de prendre un douche. BIM 2nd malaise. J’ai le temps d’appeler maman qui vient vite me ramasser dans la douche. Mon état empire.

Lundi 2 Octobre

La descente aux enfers commence



Incapable de marcher on me met en fauteuil roulant puis sur brancard. On nous place dans un box avec ma mère. Un interne arrive « Non, ça n’a rien d’une varicelle. Patientez, vous allez voir un dermatologue ». Le temps est long. Long. Long.


On doit nous conduire dans le service dermato. Des brancardiers qui disent : « Je touche pas à ça. » GENIAL. Les aides-soignantes me transportent donc en service de consultations dermato. On me met dans un couloir, un masque sur la bouche. Les gens me regardaient comme un monstre. 

La dermatologue me reçoit. Une interne très gentille et douce. Je sens qu’elle est assez impressionnée. Elle appelle ses chefs de service. J’ai beaucoup de fièvre alors je ne suis pas au meilleur de ma forme. On me demande de me déshabiller. Les lésions sont étendues sur le tronc, le dos, les mollets, un peu au niveau des bras, + visage, et muqueuses. Mes parents me rejoignent. Les docteurs sont 3 autour de moi. On évoque un « Stevens Johnson » (c’est qui celui-là ??) ou un Erythème Polymorphe (à tes souhaits, merci). Ces noms ne nous disent RIEN. On me demande de répertorier TOUS les médicaments que j’ai pris sur le dernier mois en cours.


« Nous ne sommes pas en mesure de la prendre en charge nous allons voir pour la transférer dès à présent à la Conception, chez les grands brûlés en réanimation. »


Ma mère craque. Pourquoi ? Mais que se passe-t-il ? Je vais mourir ? En réanimation ? Chez les grands brulés ? Bien sûr je me pose ces questions intérieurement. A ce moment-là la seule chose que j’ai demandé c’était un anti douleur puissant, car je n’en pouvais plus de souffrir de la sorte. On me fait une biopsie (avec anesthésie locale) et on me renvoie dans mon box avant d’être transférée. Avant de m’en aller on me pose une perf, et on me passe de l’acupan.
Le transfert se passe mal. Je ferme mes yeux, impossible de les rouvrir. Confusion et panique totale.


Je ne savais pas à ce moment-là, que ce n’était que le commencement.

L'hospitalisation


J’arrive à la Conception le mardi 3 Octobre 2017 vers 18h00 / 19h00.


Avant de quitter l’hôpital d’Avignon, les lésions étaient étendues sur 30 % de la surface corporelle (Syndrome de Steven Johnson). Arrivée à la Conception, j’en étais à 70 %.

Lorsque j’arrive, mes yeux sont toujours fermés, impossible de les ouvrir naturellement (sensation horrible). Le personnel soignant me rassure. Chacun se présente en me donnant son prénom. On m’explique ce qu’il va se passer. On doit me poser un cathéter artériel dans le poignet droit. Ça ne fait pas mal grâce à une anesthésie locale. Cette partie-là se passe bien. Ensuite on doit me poser une sonde urinaire. Aïe x20. L’infirmier qui me l’a posée a par contre fait preuve d’une sensibilité qui m’a touché, il s’est excusé plusieurs fois. Cela fait beaucoup de bien psychologiquement. Au bout d’un moment on m’ouvre les yeux. Le décollement a fait mal. Mais j’y vois. Je les vois tous autour de moi. Tous gentils et prévenants.


J’ai froid à cause de la fièvre, ils montent la température à + de 30 degrés. J’étais mieux ! Ils commencent à m’expliquer qu’ils allaient devoir me bander de la tête aux pieds. HEIN?! Je ne comprends toujours rien à rien.

Ancre 4

Le processus commence : ils nettoient le corps, me couvrent de linges aseptisés pendant 10 minutes, puis me bandent. Lors du pansement, j’ai souvenir qu’il y avait une infirmière et une aide-soignante. Ces deux-là ont été géniales. Elles me parlaient beaucoup, de tout, de rien. Elles blaguaient. Ca faisait du bien.


Sauf qu’à un moment, l’infirmière me dit très gentiment, « Camille, il faut que tu saches. Il est possible que demain nous soyons obligés de te raser la tête. Je préfère te le dire pour que tu t’y prépares et qu’on ne te prenne pas de court. » Je pleure. Je ne comprends rien. Quelle maladie peut me conduire à me faire bander comme une momie, et me conduire à me faire raser le crâne ?


Cette étape aura duré un peu moins de 3h00. Je retrouve mes parents qui me voient comme une momie. Il est tard. Ils ne resteront pas avec moi.

 

Je passe une première nuit très difficile, je me plains beaucoup de la douleur que j’ai dans la bouche. On me donne un somnifère.
 

Très tôt le matin il y a un souci. Le cathéter artériel ne tient pas. Le personnel soignant essaye à plusieurs reprises d’en re poser un. Puis dans l’autre bras. Cela finit par fonctionner je crois. A part qu’au bout d’un moment les anesthésies ne faisaient plus leur effet. Aïe.

Vers 8h00 / 9h00 commencent les examens. Radios de la cage thoracique (je ne savais pas du tout pourquoi – c’était pour vérifier si les organes étaient touchés). On doit me re faire un pansement.
La surface corporelle était atteinte à 90 %.

L’interne D. arrive. Il ne me fait pas une bonne première impression. Il m’angoisse un peu dans sa façon de me regarder et de me parler, très détaché. La pire journée de cet épisode commence.


« Bon est ce qu’on vous a expliqué un peu ce qu’il se passait ? » « Non »

 

« On doit s’assurer que vos organes ne sont pas touchés » « ah. »


Il doit poser la voie centrale. Je ne connaissais pas du tout. Un cathéter qu’on pose au niveau du cou et qui va jusqu’au cœur (il me semble). Aïe, merci petite anesthésie locale.


Alors l’interne D. commence la manipulation. Comme si ça ne suffisait pas que je sois super mal, il est entouré d’étudiants en première année, à qui il commence à poser des questions théoriques du genre « Alors alors, quelles sont les principales artères du corps humain ? » . Les étudiants se plantent du coup il les reprend. Pendant ce temps j’ai le visage sous le champ. Je respire à peine. Je dois demander à ce qu’on soulève ce maudit champ pour avoir de l’air. Il rate son geste une fois. Je ressens une douleur gênante au niveau du poumon. J’ai mal. Du coup je lui dis que j’ai vraiment mal au niveau du poumon. « Ah. J’ai dû décoller un poumon. En envoyant de l’air, ça arrive. ». Il ne s’excusera jamais. Il me recommence son geste et le réussit cette fois ci. Bien.


Mais ce n’est pas fini. « On va vous faire des biopsies ».


A part que là, on ne m’endort pas. Merde. Pourquoi on ne me passe pas un gel ? Ou pourquoi on ne me fait pas une petite anesthésie locale ?


Donc oui, D. va réaliser 4 biopsies à vif. Je pleure. Je crie. Je leur demande « s’il vous plait stop ».  Je n’ai jamais eu si mal.

Au fait pourquoi 4 biopsies ? Une fois la 3ème terminée il dit « je l’ai ratée. Je vais la refaire ». Il ne n’excuse toujours pas. Cette personne m’a réellement traumatisée. Il n’a pas été prévenant. Si il m’avait conditionnée en me disant « ça va être douloureux, c’est un mauvais moment à passer. Je vais compter jusqu’à trois et on y va ». Non rien. A ce moment-là j’étais un numéro, sur un lit. J’ai eu envie de mourir. Sur cette table. Rien ne valait la peine de continuer à ce moment-là. Des gens rentraient dans la chambre pour prendre des photos de moi. J’avais l’impression d’être un animal de laboratoire.

 

Puis soudain, une lueur d’espoir. Celle qui m’a donné envie de vivre un peu plus : l’ophtalmologue M. arrive. Elle me parle. Elle est gentille avec moi. Elle est douce. Elle me retourne les paupières et me fait des injections. Je n’ai rien senti. Elle a été la plus belle chose qui pouvait m’arriver ce jour-là.

Fin de cette matinée. On me re bandera. Encore de la tête au pieds. Cette fois on me fait des pansements à l’argent, sur le visage et les mains on me met une pâte à base de bétadine. La douleur est difficile à gérer. J’ai la sensation d’avoir de l’acide sur le visage. Je demande un calmant, en essayant de me plaindre le moins possible. La douleur passe, merci morphine ! Au niveau des yeux : ils sont touchés également, j’ai des injections tous les 2/3 jours, et des gouttes à mettre toutes les heures (chibrocadron + gel larme + vitamine A avant le coucher). Concernant la bouche, ça a été pour moi le plus douloureux. Rien à faire, à part des calmants, et une patience de fer.

 

14h00 : l’heure des visites. Mes parents arrivent. Je leur raconte que cette matinée a été très difficile à vivre.

 

L’interne D. vient dans la chambre. « Bon, puisque le cathéter artériel dans votre bras ne tient pas, je vais revenir pour vous en poser un dans l’artère fémorale ». Il part, je commence à pleurer. Une infirmière arrive. Je lui dis que ne veux pas qu’il revienne. Je ne veux plus qu’il me touche. Elle comprend.
A partir de là, l’interne D. ne s’est plus jamais occupé de moi. (Non il ne s’est jamais excusé).

[Les photos qui suivent risquent de heurter la sensibilité de certains.]

 

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La première semaine, j’étais donc en réanimation « chaude ». Suivi de très prés. Le Docteur W. qui m’a pris en charge a été formidable. A l’écoute, douce, et rassurante. C’est elle qui m’a dit qu’on ne me rasera pas la tête. Quel soulagement cela a été. Mes cheveux sont la seule partie de mon corps qui me rattache à la personne que j’étais avant.


Durant cette période, j’ai eu des radios tous les matins, les pansements à l’argent étaient changés tous les 3 jours. On m’a débandé le visage puis les mains le dimanche 8 Octobre. Je n’en pouvais plus. Je ne savais toujours pas ce que j’avais. Je pleurais tous les jours.


Les lésions se sont étendues jusqu’à ma trachée. De fait, durant 3 jours je m’étouffais beaucoup, je crachais beaucoup de glaires et de sang. Cette étape est passée assez vite mais a été très dure pour moi et aussi pour mes proches. Je n’arrivais pas à dormir. L’effet des somnifères n’étaient pas du tout reposant. Du coup je suis passée au lexomil assez rapidement. J’en prenais avant de dormir, histoire d’être moins angoissée.


Notez que durant cette première semaine, personne n’a dit à mes proches ce que j’avais. Il a fallu attendre que mon état se stabilise avant qu’on leur parle du syndrome de Lyell. Et Dieu merci ! Au moins ils ne sont pas allés s’alarmer sur internet en lisant tout ce qui était rattaché à cette grave maladie.


Je n’ai pas voulu avoir beaucoup de visites durant mon hospitalisation. Je ne voulais que ma famille près de moi, et des amies vraiment très proches. J’ai eu une extinction de voix durant 2/3 jours à cause des étouffements. Je ne dormais que quelques heures la nuit. Peut-être 3 heures maximum.

Conclusion de ma première semaine

 

Je garde pas mal de souvenirs difficiles concernant la période où j’étais en réanimation au chaud. Je me souviens de la douleur, de mes crises d’angoisses, de mon désespoir, du changement des draps qui est une réelle épreuve à chaque fois, de la douleur de voir mon chéri et mes parents quitter la chambre chaque soir, etc. Les montagnes russes émotionnelles. Heureusement que le personnel soignant étaient ce qu’ils étaient, ils ont rendu ces jours sombres un peu plus lumineux. Ils ont ma reconnaissance éternelle et je les admire réellement d'être ce qu'ils sont ! <3

La deuxième semaine en réanimation au tiède était « mieux ».


Dans le sens où la chambre faisait moins peur. Je ne mangeais toujours pas. J’ai fait pas mal de rééducation, j’ai pu remarcher assez vite, milieu de la deuxième semaine il me semble. Sentiment de liberté. Idem quand on m’a enlevé la sonde urinaire, puis débranché de partout. On devait m’irriguer 3x par jours. Ce n’était pas une partie de plaisir. Mais le personnel soignant a tellement été gentil que je le supportais bien.  Je continue le chibrocadron toutes les heures + le gel larme pour les yeux. Je n’ai pas de douleur à ce niveau-là.


L’atteinte buccale est importante. Chaque gobelet de soupe est un supplice. Mais je dois manger. Les protéines sont très importantes, je savais qu’il fallait que j’en consomme beaucoup. Je me suis battue contre moi-même afin d’y arriver. 


Côté résultats, nous n’avons toujours pas les conclusions des biopsies. Les docteurs se prononcent en disant qu’à 95% c’est un syndrome de Lyell. Je ne savais toujours pas ce que ça engendrait cela dit. Je n’étais pas encore allée voir sur le net ce qu’on en disait.

Conclusion de ma deuxième semaine

 

Mentalement c’était les montagnes russes. Je pleure tous les jours. Des fois je vais mieux, j’arrive à penser à autre chose. Le fait de retrouver mon autonomie est à mes yeux un pas vers ma guérison. Mon état est stable, pourtant je craque facilement. Le personnel soignant me rassure : « Tu n’as pas de séquelles aux organes, tes yeux ne sont pas trop touchés, il n’y a pas de signe de repousse, tu te remets vraiment vite pour un Lyell ». Attendez, quoi ? Oui, on peut faire une repousse… J’y ai échappé. Mais j’ai des lésions sur 90 % du corps. Plus rien ne sera jamais comme avant. Les pansements à l’argent déteignent sur ma peau. Je suis marron du tronc aux pieds. Hum, ça part au moins ? Mais oui ! Ouf!


Je sais que je suis dévisagée. Si je suis chez les grands brulés et que j’ai des pansements sur le visage, c’est que je ne suis sûrement pas le sosie d’Emma Watson :-/ L'acceptation de la perte de mon visage a été dure à gérer, heureusement que le temps a fait son boulot. Aujourd'hui je ne vois quasiment plus les marques sur mon visage.

La troisième semaine.
Avant d’entamer la 3ème semaine, encore une mauvaise passe un soir.
J’apprends qu’on doit me poser une nouvelle perfusion. L’interne de garde ne sait pas pourquoi. Je me demande ce que j’ai bien pu faire pour régresser comme cela. Faire un bond en arrière. Je passe une très mauvaise nuit, j’ai des angoisses, je me sens tellement mal.


Le matin un interne vient me voir pour parler un peu. La perfusion n’est pas pour moi, erreur de patient. Je pose les questions que j’ai à lui poser. J’ai les réponses à toutes mes questions, je suis rassurée .

Un autre médecin vient me voir « Alors je ne sais pas si c’est une bonne ou une mauvaise nouvelle, mais on va vous transférer à La Timone, en service de Dermatologie, nous avons besoin de la chambre. » J’ai eu peur, j’ai dû commencer à rassembler mes affaires, vite vite. Puis le départ fut assez précipité. Je n’ai pas eu le temps de faire un coucou aux infirmiers et aides-soignants que j’avais l’habitude de voir tous les jours. Ils étaient si gentils avec moi ! Je voulais les voir avant de partir. 

Alors on arrive à LA TIMONE. J’ai une chambre individuelle, plus sympa qu’à la CONCEPTION ! Petite salle de bains avec baignoire, la fenêtre s’ouvre, je peux entendre les oiseaux chanter et sentir un peu d’air. Et grande surprise : je peux avoir quelqu’un qui dort avec moi. Meilleure nouvelle que je pouvais recevoir. De plus nous avons les résultats de la Biopsie ! C’est bien un syndrome de Lyell. On me remet ma carte d’allergique.

Le lendemain de mon transfert on m’enlève mes bandages afin de voir l’évolution de la cicatrisation ! Bonne nouvelle ! C’est super, on peut tout enlever !!!!! Plus de pansements ! Bon j’ai le corps tout marron mais ça va ! On m’aide à me laver. Je dois me passer de la crème seule. C’est très dur de ré apprendre à toucher ce corps, qui n’est pas à moi. Où est l’ancien ? Je le préférais.. Je vous rassure, au fil du temps, je l’apprivoise et l’accepte :-)

Les soins que j’ai durant cette semaine sont la Cold Cream le matin, les gouttes dans les yeux toujours avec le chibrocadron et le gel larme, et deux fois par jour j’avais un soin fait avec un vaporisateur Lucas sur les lèvres, afin de détacher les croutes et peaux mortes. L’état de l’intérieur de ma bouche s’est aggravé cela dit. Je passe deux jours sans pouvoir parler. Avant de manger je prends une ampoule d’acupan, puis je mange.


Mes parents demandent à ce que j’aie une permission pour rentrer à la maison une nuit et un jour. Les médecins acceptent.


Retour à l’hôpital, mon chéri dormira avec moi plusieurs nuits, sur un petit lit de camp. Nous sommes heureux d’être réunis ! Ça fait du bien au moral de ne pas passer une nuit seule. J’aurais perdu 6KG en deux semaines à la Conception. Je reprends peu à peu des forces. Je me lave seule, même si je mets pas mal de temps. Je recommence à me regarder dans un miroir.


Je finirai pas sortir à la fin de cette 3ème semaine, les médecins me font mes ordonnances et me donnent la marche à suivre pour commencer ma nouvelle vie. J’ai un milliers de questions à leur poser. On me prend des rendez-vous en consultation chez un gyneco, un cardiologue, et je dois revenir à la Timone dans 3 semaines pour une consult dermato.

Le 24 Octobre 2017 je sors de la Timone. Rassurée, mais effrayée à la fois.

La sortie de l’Hôpital

Ancre 5

Le retour à la maison n’a pas été aussi facile qu’on peut le croire. Les quelques premiers jours je restais dans ma chambre, enfermée. A avoir peur du soleil, de sortir, de croiser le regard des gens.


Ma première sortie fut une véritable catastrophe, au point de ne plus avoir eu envie de sortir durant encore plus d’une semaine, à moins d’y être contrainte, pour aller chez un médecin ou autre. Aujourd'hui je recommence à sortir, seule ou accompagnée ! Ça fait vraiment du bien de retrouver le monde extérieur.


J’ai vite entamé une thérapie. Thérapie par laquelle je pense que chaque personne ayant été victime d’un syndrome de Lyell ou de Steven Johnson devrait passer vu le traumatisme que cela engendre ! Je vide mon sac et fais le deuil de cet épisode de ma vie.


Les premières nuits je n’arrivais pas à dormir. Impossible. J’avais encore l’impression d’être à l’hôpital. J’avais peur de devoir y retourner. J’ai donc également commencé des séances de Kinesiologie ! Pratique que je ne connaissais pas, et que je n’avais jamais expérimenté. Je recommande cette pratique. C’est grâce à cela que j’ai pu réussir à retrouver petit à petit mon sommeil.

La seconde semaine après ma sortie, j’ai eu pas mal de visites d’amis proches. Cela m’a fait du bien. J’ai pu parler, commencer à vider mon sac. Essayer de mettre des mots sur ce que je ressentais. J’ai pu approfondir ce travail-là durant ma thérapie (que je continue à ce jour).


Au fil du temps je sortais petit à petit. Au départ seulement dans mon jardin. L’appétit est revenu très vite, à vrai dire j’ai tellement rêvé de manger de tout et n’importe quoi que je me languissais de manger ! Etant donné que l’atteinte buccale était assez importante, j’ai fait attention à ce que je mangeais. 


Idem pour la toilette. Une vraie galère au départ. Très affaiblie à cause de l’hospitalisation, c’était assez difficile de me laver, me passer la crème sur le corps… 


Le temps passe, je réapprends à me pomponner, je prends de nouveau du plaisir à me préparer, à me faire belle et à sortir <3 Je ne vois plus les choses de la même façon, ça c'est sur :-)

Les séquelles que m’a laissé mon Lyell sont principalement esthétiques, à l'heure où je rédige ceci, nous sommes 3 mois après ma sortie de l'hôpital (Janvier 2018).


J’ai des cicatrices de brûlures au second degré sur tout le corps, donc je me mets de la crème hydratante tous les jours sur le corps. J’alterne avec d’autres crèmes que je trouve tout aussi confortables. Niveau visage j’hydrate aussi matin et soir. Si je prévois de sortir durant la journée je me passe une crème solaire indice 50 sur le visage et le cou. 


 

  • Niveau oculaire je m’en sors vraiment bien, j’ai une sécheresse oculaire légère, le canal lacrymal un peu bouché. Rien de plus. Je mets du gel larme à volonté tous les jours + une goutte de Liposic le soir avant le coucher. Je me masse également les yeux tous les jours, matin et soir, afin de stimuler le canal lacrymal.

  • Niveau buccal, j’ai encore les gencives enflammées, ma langue est pleine de cicatrices, mais je n’ai pas perdu le goût. Mes lèvres ne sont plus aussi élastiques qu’avant, sachant qu’elles sont toutes neuves c’est normal. Je les hydrate tous les jours aussi.

  • Divers : j’ai un décollement des ongles (pieds / mains). C’est une séquelle que l’on retrouve beaucoup après ces syndromes. Cela n’est pas du tout douloureux. Il suffit de ne pas y toucher et ça va. Prendre son mal en patience surtout, le détachement complet pour les mains durera 6 mois et 9 pour les pieds. Mes cheveux vont très bien ! Ouf !
     

  • Niveau psychologique : traumatisme, donc thérapie + kinésiologie.

Mes Séquelles

Ancre 2

Aujourd’hui je ré invente ma vie. Après avoir traversé l’enfer, on ouvre les yeux sur beaucoup de choses. La vie est belle, et elle devient d’autant plus belle lorsqu’on traverse des épreuves si difficiles. Cela ne vaut pas que pour les rescapés des syndromes de Stevens Johnson ou de Lyell, cela vaut pour toutes les maladies qui nous tombent sur le coin de la gueule et essayent de nous pousser vers la sortie. Ma maladie m’a rapproché encore plus de ma famille et de mes amis, et a renforcé mon histoire d’amour comme personne ne pourra l’imaginer .

Mon syndrome de Lyell est surement la plus belle leçon de vie que je pouvais avoir. Je n’en sors pas indemne, mais j’ai survécu. Et je compte bien en tirer quelque chose de positif ! Alors me voilà aujourd’hui à partager mon vécu, mes astuces et envoyer un bon paquet d’ondes positives à toutes les personnes qui comme moi, se battent chaque jour contre la maladie pour lui survivre, et s’en sortir plus forts. <3

Camille

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